Airbnb et les JO : un partenariat qui fait grincer des dents

L’annonce du partenariat entre le CIO et Airbnb, qui concerne notamment les JO de Paris 2024, a suscité une vive polémique. Dans un communiqué, l’Umih dénonce “un partenariat inopportun” et “irrespectueux envers les professionnels de l’hôtellerie”.

Les réactions se multiplient suite à l’annonce du partenariat entre les CIO et Airbnb. Dernière en date, celle de l’Umih. Roland Héguy, le président confédéral de l’Umih Laurent Duc, le président Umih de la branche hôtellerie et Jean-Virgile Crance, président du GNC, ont vivement réagi face à cette alliance qui concerne notamment les JO de Paris 2024. “Ce partenariat est inopportun et il est outrageux de faire de cette entreprise qui joue de la dérèglementation dans tous les pays du monde un partenaire mondial du CIO. Où est la moralité ?”, s’indignent-ils. “De plus, ce partenariat est totalement irrespectueux envers les professionnels de l’hôtellerie qui ont travaillé depuis la phase de candidature avec l’équipe d’organisation des JO 2024 à Paris. L’offre hôtelière parisienne et francilienne était d’ailleurs un atout dans le dossier de candidature de la ville de Paris. Que vient faire Airbnb dans cette offre ?”

Courant jusqu’en 2028, le contrat entre Airbnb et les JO est évalué par des médias spécialisés à environ 500 millions de dollars (450M€). Il permettra à la plate-forme d’afficher sa marque aux abords des sites de compétition à Paris. Pour la firme américaine, l’enjeu est de se présenter sous son meilleur jour, pour redorer son image face à de nombreuses controverseset ce à la veille d’une entrée en bourse prévue pour 2020. L’accord entre le CIO et Airbnb couvrira au total cinq éditions des JO Tokyo en 2020, Paris en 2024 et Los Angeles en 2028 pour l’été, ainsi que Pékin en 2022 et Milan-Cortina en 2026 pour l’hiver, a précisé le CIO.

« Deux règlements différents pour le même match »

Lundi, Tony Estanguet, le président du Comité d’organisation des Jeux olympiques (CoJo), a voulu rassurer le secteur de l’hôtellerie après l’arrivée d’Airbnb comme un des principaux sponsors de l’olympisme. « Le partenariat avec Airbnb est un choix du CIO (Comité international olympique, NDLR) à l’échelle globale. Il recouvre plusieurs éditions des Jeux olympiques et Paralympiques sur de nombreuses années. De notre côté, nous avons fait le choix, depuis la phase de candidature, de nous appuyer sur les infrastructures hôtelières incroyables de la capitale », a indiqué Tony Estanguet.  « Des accords ont été signés en nombre suffisant pour couvrir nos besoins en 2024 avec ces entreprises de l’hôtellerie/restauration reconnues pour leurs savoir-faire et leur art de vivre à la française », a continué le patron du CoJo, indiquant que « 618 hôtels font partie de l’inventaire » pour accueillir sportifs et spectateurs.  Pour Tony Estanguet, « l’annonce du CIO ne remet en cause d’aucune manière cette démarche, que nous poursuivons » et n’empêche pas Paris-2024 d’envisager des partenariats nationaux avec des entreprises du secteur de l’hébergement.

Cet épisode ravive en effet une nouvelle fois les tensions au sujet du groupe américain. “Des questions se posent à présent : n’est-il-pas temps que l’hébergement Airbnb réponde aux mêmes contraintes et normes que les hôtels en matière de sécurité, d’accessibilité et d’accueil 24/24 pour assurer la même protection aux clients ? Faut-il revenir sur les contrats globalisés passés entre les hôteliers et l’équipe d’organisation des JO ?”, se demande ainsi l’Umih. « Une fois de plus, deux règlements différents pour le même match, où est le fair-play ? », s’insurge Roland Héguy.

Un référendum sur Airbnb à Paris ?

D’autant que les professionnels de l’hôtellerie ne sont pas les seuls à être irrités par Airbnb. La Mairie de Paris, qui dénonce régulièrement les conséquences de l’activité de la plate-forme sur l’offre de logement notamment, étudie en effet la possibilité d’interdire purement et simplement les locations Airbnb dans certains arrondissements, ainsi que le confiait récemment Jean-François Martins, adjoint au Tourisme et au Sport, dans une interview à L’Echo touristique.

La maire de Paris s’engage à « organiser immédiatement après les élections un référendum pour définir les bonnes conditions d’usages d’Airbnb », a indiqué lundi sur Franceinfo son premier adjoint, Emmanuel Grégoire. En campagne pour sa réélection, Anne Hidalgo vient d’écrire au président du CIO Thomas Bach pour « l’alerter sur les risques et les conséquences » d’avoir accepté la plate-forme de location entre particuliers comme l’un des principaux sponsor des JO. « En soustrayant à Paris un nombre important de logements, Airbnb est un facteur d’augmentation du prix des loyers et d’aggravation de la pénurie de logements », a expliqué Anne Hidalgo dans sa lettre à Thomas Bach. Les villes qui accueillent les JO sont « victimes des activités prédatrices de ce type d’opérateurs », a conclu Emmanuel Grégoire.

Plusieurs contentieux opposent le géant américain à la Ville de Paris, à moins de cinq ans des JO dans la capitale française. En février, la mairie de Paris a ainsi assigné en justice la plate-forme, passible d’une amende de 12,5 millions d’euros pour avoir mis en ligne 1 000 logements non enregistrés.

Le sujet promet en tout cas d’être au cœur des prochaines municipales à Paris, en mars 2020.

Emilie Vignon- L’Echo touristique

Recherche similaire basée sur : AirBnB, JO 2024, Paris