Les professionnels de l’hôtellerie-restauration et du tourisme s’inquiètent du manque de visibilité alors que certains d’entre eux accusent une baisse sensible de leur activité.
Dans l’hôtellerie et plus largement dans le tourisme, les conséquences économiques et sociales du mouvement des « gilets jaunes » ne seront véritablement tirées qu’au début de 2019. La brutale dégradation de l’image de la destination France a non seulement percuté l’activité à court terme, mais pourrait peser sur la fréquentation du pays au début de l’année prochaine.
Vases communicants
Pour Paris et l’Ile-de-France, le repli de l’activité en décembre par rapport à un an plus tôt est de l’ordre de 10 %, indique le président du groupement des chaînes hôtelières GNC, Jean-Virgile Crance. Le PDGFrance & Benelux de l’opérateur de détaxe Planet, Denis Leroy, fait état d’une baisse de 6 % en valeur dans la capitale pour les touristes non européens. « La tendance était à la hausse, de 10 %, en novembre », constate-t-il. Pour la zone Champs-Elysées/avenue Montaigne, particulièrement ciblée, la chute atteint même 30 % après l’acte V des « gilets jaunes ».
Mais ce dernier observe aussi « un phénomène de vases communicants » d’une zone de shopping à une autre. Si le huitième arrondissement parisien a été délaissé en décembre, Planet enregistre simultanément un bond de son activité de 50 % pour La Vallée Village, située non loin de Disneyland Paris. Et, si certains grands hôtels parisiens ont particulièrement souffert, pour la chaîne d’établissements économiques B&B Hotels, présente notamment en périphérie de la capitale, « l’impact reste limité », note son directeur général, Fabrice Collet.
Une bonne année
Si le mouvement social des « gilets jaunes » aura, à coup sûr, freiné la dynamique du tourisme français, le cabinet d’études et de conseil MKG indique néanmoins que « l’industrie hôtelière française a connu, dans son ensemble, une très bonne année 2018 » avec un taux d’occupation moyen en hausse de plus de 1 point par rapport à 2017, à 68,2 %. La fréquentation est supérieure à celle de 2014, dernière année de référence avant les attentats, et approche le niveau record de 2007, selon MKG.
Mieux, 2018 est une année « record » en termes de recette unitaire par chambre disponible (RevPAR), l’indicateur de référence en matière de rentabilité. Pour la « première fois », il dépasse 60 euros.
Coup de frein
« Le match n’est pas fini », souligne toutefois le directeur général d’Atout France, Christian Mantei. De fait, les images des derniers actes violents, qui ont tourné en boucle sur les chaînes d’info du monde entier, ne plaident guère pour la destination France. « Le mal qui a été fait est considérable », estime Jean-Virgile Crance. Outre les annulations, le dirigeant relève un « coup de frein sur les réservations ».
« Les réservations, en retrait de 20 % par rapport à décembre 2017, ne repartent pas », confirme le groupement patronal de l’hôtellerie-restauration GNI. 78 % de ses membres relevant du secteur cafés-bars-restaurants enregistrent un retrait d’au moins 10 % de leur chiffre d’affaires, et jusqu’à plus de 30 % pour 23 % d’entre eux. S’agissant du réveillon du Nouvel An, « il reste des tables libres, y compris pour les restaurants les plus recherchés », ajoute-t-on au GNI.
Pour début 2019, Christian Mantei fait part d’une baisse des réservations aériennes pour la période courant du 1er novembre au 12 décembre de 4,8 % pour la France et de 5,4 % pour Paris. En novembre, les chiffres de trafic de Paris Aéroport et d’Air France ne laissaient toutefois apparaître aucun fléchissement. Le nombre de passagers était en augmentation de 6,4 % à Roissy-CDG, de 3,3 % à Orly, de 4,3 % sur les lignes long-courriers d’Air France et de 13,8 % sur les vols bon marché de Transavia.